30/10/2008
Motion-E : volet économique
Comparaison des propositions économiques des motions du Congrès de Reims
L’effondrement du capitalisme financier, la crise du pouvoir d’achat, des rapports sociaux dans l’entreprise ainsi que la crise écologique rendent plus que jamais nécessaire une orientation économique claire du PS et en font un élément capital de sa crédibilité.
La motion signée, entre autres, par Ségolène Royal se différencie des autres motions sur trois aspects :
• Son caractère anticipateur : il ne faut pas seulement constater les méfaits du capitalisme financier, mais il faut les prévenir pour mieux les affronter ;
• Le choix du combat : toutes les avancées sociales ont été arrachées par le combat et les luttes sociales contre la droite la plus conservatrice. On ne peut reporter à de futures conventions les choix urgents du parti socialiste ce qui laisserait à Nicolas Sarkozy le champ libre jusqu’à 2012 ;
• La précision de ses propositions (crise financière, retraites, pouvoir d’achat modèle de développement économique). On notera sur ce point la faiblesse de la motion de Bertrand Delanoë très influencée par l’action municipale mais qui ne fait pas le dernier kilomètre vers les propositions concrètes sur les enjeux nationaux (retraite, fiscalité…).
1/ Mondialisation et crise financière : anticiper et affronter
Notre motion « L'espoir à gauche, fier(e)s d’être socialistes » axe ses propositions sur :
• La mise en place de nouvelles régulations (détaillées dans la motion, inspirées des réflexions menées au niveau international par la FSE…) ;
• Réunion d'un nouveau Bretton Woods afin de réguler mondialement le nouvel ordre financier et économique qui s'est mis en place ces derniers temps ;
• Responsabilisation et réhabilitation du rôle de l'Etat aussi bien en amont qu'en aval ;
• Réorientation de l'épargne nationale vers l'investissement productif ;
• Réorientation de la finance en direction des PME, principaux producteurs de richesses matérielles, humaines et environnementales.
Elle se distingue par le choix d’une politique de combat. Il ne s’agit pas de se lamenter longuement sur les effets de la crise mais de l’affronter en mettant fin aux dérives spéculatives par de nouvelles régulations. Ceci implique un repositionnement mondial de la France vers une économie de pointe, et l’interdiction aux fonds spéculatifs d’engager plus d’argent que ne leurs permettent leurs réserves, la lutte effective contre les paradis fiscaux et le blanchiment d’argent.
La motion de Bertrand Delanoë parle certes de durcissement de la mondialisation, et de non-préparation de la France à celle-ci (éléments connus depuis dix ans ) mais reste très discrète sur les solutions reprenant au passage plusieurs idées de Ségolène Royal (comme le nouveau modèle de développement, ou la justice sociale)
La motion de Martine Aubry s’étend longuement sur la description de la crise et le risque de déclassement économique et financier de la France. Elle propose le renforcement des règles de prudence des banques et des systèmes de surveillance des marchés. Mais là encore sans être aussi précise que la motion E « L'espoir à gauche, fier(e)s d’être socialistes ».
La motion de Benoît Hamon n’hésite pas, pour sa part, à proposer une solution utopique en développant des thèses protectionnistes essentiellement défensives comme la sortie du libre-échange, les tarifs extérieurs, alors qu’il s’agit au contraire de rétablir leur compétitivité mondiale notamment par l’innovation.
Notre motion propose une mesure concrète, applicable, là où la sortie du libre-échange ne l’est pas, de protection offensive des PME créatrices de richesses : un Small Business Act pour la France. Ce mécanisme utilisé aux Etats-Unis est une dérogation aux règles du libre-échange qui oblige la puissance publique à réserver une part de leur budget à des PME indépendantes.
2/ Quel modèle de croissance ?
La motion E axe ses propositions sur :
• L’invention d’un nouveau modèle de croissance préparant l’après-pétrole et faisant de l’écologie l’axe essentiel du projet de société des socialistes (souvenons nous de l’excellence environnementale de la campagne présidentielle), en développant massivement les énergies renouvelables, déconcentrées et décentralisées ;
• Une manière nouvelle d’aborder la mesure de la création de richesse ;
• La création d'une économie de pointe qui fera le pari de l’enseignement et de la recherche (3% du PIB) ;
• Une réorientation du rôle de l’Etat préventif, régulateur et protecteur ;
• La recherche de l’efficacité énergétique.
On retrouve les mêmes termes dans les motion de Benoît Hamon et de Martine Aubry. Cependant que la motion de Bertrand Delanoë propose la mise en place au niveau européen d’une véritable politique industrielle des produits et technologies propres.
Sur ce point les motions Delanoë, Aubry et Hamon reprennent les idées développées par Ségolène Royal dans la campagne présidentielle en insistant (Aubry) sur la nécessité d’une montée en gamme de l’appareil productif et d’une vraie politique industrielle ainsi que de la conciliation entre écologie et justice sociale et sur une politique européenne de gestion de l’eau et d’une refonte de la fiscalité selon le principe pollueur payeur (Hamon).
3/ Place des entreprises, le point de clivage central entre notre motion et les autres.
C’est sur cette question que notre motion crée le clivage le plus important.
• C’est sur les entreprises et particulièrement les PME qu’il convient de s’appuyer pour faire émerger l’économie de demain ;
• Développer les politiques favorables à la création d’entreprises ;
• Accompagner les PME pour qu’elles passent à la dimension supérieure ;
• Investir dans les politiques d’innovation capables de nous différencier des pays émergents.
Dans la motion de Martine Aubry on parle de moduler l’impôt sur les sociétés en fonction de la part des bénéfices réinvestis, de taxer les entreprises abusant des emplois précaires, d’interdire les stocks options pour les principaux dirigeants exécutifs, de limiter les parachutes dorées
par des conventions collectives. Ce sont toutes des mesures intéressantes et nécessaires mais qui placent l’entreprise non pas comme un partenaire mais uniquement comme un objet d’encadrement et de surveillance.
La motion de Benoît Hamon ne considère pas l’entreprise mais des politiques publiques et des stratégies industrielles, comme si ces stratégies se construisaient sans partenaires.
La motion de Bertrand Delanoë ne consacre que quelques lignes aux PME pour constater que ces dernières fournissent 69 % de l’emploi salarié et qu’il faudra une action publique puissante pour financer efficacement la création de PME innovantes, développer le capital risque.
Il y a un accord entre les motions pour conditionner les aides aux entreprises à des négociations salariales engagées et abouties et pour la limitation des parachutes dorés, thème repris depuis par Nicolas Sarkozy.
4/ Capital, travail et relations sociales
La motion E, "L'espoir à gauche, fier(e)s d'être socialistes" insiste sur le fait que la France connaît un véritable problème de relations sociales qui se conjugue avec une relation capital/travail fortement déséquilibrée et propose :
• Un véritable dialogue social ;
• Une syndicalisation de masse ;
• La recomposition des conseils d'administrations avec 30 % de salariés (proposition la plus audacieuse sur ce point) ;
• Une véritable place de la formation tout au long de la vie : parcours professionnel sécurisé.
La motion de Bertrand Delanoë abonde dans le même sens en parlant de renforcement des syndicats, de représentation des salariés, en allant moins loin dans les solutions et en restant plus vague. Elle reprend l'idée du parcours professionnel sécurisé de la campagne de Ségolène Royal.
La motion de Martine Aubry évoque de même le renforcement des syndicats et le besoin d'améliorer les relations sociales et de répartir les richesses.
Le pôle écologique axe sur le développement social.
La motion d'Utopia établissent la puissance publique dans l'entreprise et le capital….
5/ Fiscalité
La motion E propose d’établir enfin une fiscalité juste :
• Réforme radicale de l'impôt sur le revenu (équité et transparence) ;
• Fusion de l'IR et de la CSG-CRDS qui impacte aussi les plus modestes afin de mettre en place un véritable impôt progressif ;
• Individualisation de l'impôt afin de lever l'injustice qui pèse sur la taxation du travail féminin ;
• Suppression des niches fiscales et répartition du gain sur l'ensemble des contribuables pour générer une baisse d'impôt ;
• Prélèvement des charges sociales sur l'ensemble de la valeur ajoutée pour ne pas pénaliser l'embauche.
La motion de Bertrand Delanoë parle de fiscalité écologique (laquelle se limite à l'approche pollueur–payeur), de rééquilibrer la taxation capital-travail et de rétablir une véritable progressivité dans l'impôt sans entrer dans les détails.
La motion de Benoît Hamon se limite aussi au concept de progressivité de l'impôt.
Le pôle écologique insiste sur la progressivité, mais développe une approche complète de la taxation écologique.
Utopia veut passer à une fiscalité internationale et annuler la dette des pays pauvres, imposer une taxation sur toutes les transactions financières et les bénéfices des firmes transnationales. Ce sont effectivement des objectifs que l’on peut tous partager mais la motion Utopia ne dit pas comment y parvenir.
6/ Pouvoir d'achat
Face à la flambée des produits de consommation courante, à la faiblesse du consommateur face aux acteurs économiques et bancaires et à la montée intolérable des loyers et charges, la motion E propose :
• Une réglementation des abus bancaires ;
• La création d'une action de groupe à la française ;
• Une réforme de l'indice CPI INSEE ;
• La gestion véritable de la politique des logements sociaux ;
La motion de Bertrand Delanoë n'a pas trop d'idées sur le sujet (« créer de nouveaux emplois… »).
La motion de Martine Aubry propose d’augmenter le SMIC, impose des renégociations salariales et un plafonnement des loyers.
La motion de Benoît Hamon augmente les salaires, et s'occupe du logement.
Tous évitent de traiter des effets pervers de l’augmentation du Smic sur les revenus légèrement supérieurs.
Conclusion
De toute évidence, il ressort de manière évidente qu’avec notre motion « L'espoir à gauche, fier(e)s d’être socialistes », nous avons procédé à un travail de fond :
• Connaissance des mécanismes financiers et économiques internationaux ;
• Positionnement micro-économique sur l'échelle mondiale ;
• Connaissances des ressorts qui activent les différents acteurs sociaux ;
• Travail approfondi de prospective.
Il en résulte une motion volontariste et réaliste, se positionnant sur l'échiquier international, avec une approche économique précise, complète, innovante qui ouvre la voie à des solutions d'avenir concrètes, efficaces répondant réellement aux attentes des Français.
Surtout, nous avons, pour chaque sujet, une stratégie systématique de non évitement.
Par Désirs d'entreprendre
14:45 Publié dans Reims Congrés 2008 | Lien permanent | Commentaires (4)